lundi 18 septembre 2017

Internet libère les artistes

Pour trouver leur public, les artistes n'avaient jusqu'à présent les spectacles et les éditeurs.

Comme pour les livres, envoyer son oeuvre à des éditeurs, c'est souvent lancer une bouteille à la mer.

Les éditeurs sont incontournables pour l'obtention d'un contrat (label, société associée à la vente de la musique).

Les nouvelles technologies et en particulier le blockchain met directement en contact les intéressés.

Comment cela marche, qu'est-ce que cela va changer pour les musiciens et pour les amateurs de musique ?



Les musiciens peuvent maintenant indépendamment et gratuitement diffuser leurs morceaux de musique

Musiques CD DVD
Par les réseaux sociaux, les webradios, les logiciels de partage avec les torrents les musiciens peuvent se faire connaitre facilement et sans investissement financier.

Des artistes connus comme le groupe Nine Inch Nails annonce la fin de ses contrats avec les labels les plus importants pour protester contre la façon dont ils sont traités ainsi que leurs fans.

Radiohead fait de même et commercialise directement su internet "en prix libre" son album "In Rainbows".

Internet est déjà un moyen d'organiser de nombreuses formes de coopération entre musiciens et de promotions de musique

Des plateformes collaboratives musicales à destination des artistes émergents comme MZRS aident à la mise en place de projets musicaux.

Les baisses de vente de CD (moins 50% en 10 ans), sont dues certainement au piratage et au partage souvent illégal. Mais ces changements sont aussi des changements de mode de consommation avec, en premier, le streaming.

En 5 ans, les revenus des ventes physiques de musiques ont chuté de 30% pendant que les revenus du numérique s'accroissaient de 40%.

Effet du piratage

Internet n'a pas appauvri les artistes, au contraire

Les ventes s’effondraient entre 2000 et 2008.
Or, dans la même période, le revenu médian des artistes progressait de 15.000€ à 22.500€.
(Etude du Centre pour la recherche économique et ses applications (Cepremap) Portrait des musiciens à l’ère du numérique p.13)

Les opinions des artistes eux-mêmes sur le piratage sont éloquentes !

Dans la même enquête, page 37, les musiciens jugent que si le piratage a un effet très négatif sur les ventes de CD, il est très positif sur l'affluence aux concerts et sur la diffusion radio.

Les concerts représentent la première source de revenus des artistes.
Les recettes des concerts, hors top 100, a augmenté de 89% (page 30) toujours pour la même période et seulement de 5% pour les top 100.

Pour autant, une large majorité d'artistes n'apprécient pas, à 70%, de retrouver leurs enregistrements partagés sur internet sans leur accord. Mais 30%, c'est-à-dire une bonne partie, y sont indifférents ou ravis. (page 39)

CD DVD

Tout le monde ne profite pas de la même façon de ces nouvelles possibilités

Il est vrai que l'auto-promotion profite avant tout aux artistes déjà connus.

Ceux qui ont une faible audience devront faire beaucoup plus d'efforts pour se faire connaitre.
Les réseaux sociaux les relayaient moins que ceux du top.

L'attention est de plus en difficile à capter, que ce soient pour les vendeurs de pub, (comme l'expliquait Patrice Le Lay quand il vendait "du temps de cerveau disponible" à Coca-Cola), ou au milieu des zappings tous azimuts et des petits chats des réseaux sociaux.

Revue CAIRN.INFO tire la conclusion pessimiste que "malgré une autopromotion en ligne soutenue des artistes de moindre notoriété, la promotion par les audiences et le succès en ligne profitent pour l’essentiel aux artistes ayant déjà rencontré le succès hors-ligne".  ("De la visibilité à l’attention : les musiciens sur Internet")

First_Aid_Kit 2017
Les plus grandes possibilités offertes par internet et les nouvelles technologies font que les prétendants sont nombreux et la concurrence est rude.

"[Ces] potentialités ne demandent qu’à être exploitées et développées.
En construisant une relation profonde avec des amateurs passionnés, des artistes parviennent à vivre de leur activité grâce à un public peu nombreux, mais fidèle et investi. Il faut savoir se tourner vers les bons interlocuteurs, les blogs influents.  [...]

Mais ces [mêmes] potentialités nécessitent en effet des capacités extra-artistiques pour pouvoir être pleinement exploitées, et pourraient paradoxalement créer davantage d’inégalités en excluant des musiciens talentueux qui ne disposent pas des capitaux et compétences nécessaires pour se mouvoir efficacement dans ce nouvel environnement, et convertir les possibilités du réseau en résultats concrets."     (Revue CAIRN.INFO  -  Internet et les nouvelles formes de liens publics/artistes
par Pierre Garcin)

Les relations artistes-publiques en sont transformées profondément

L'auto-promotion nécessite un certain savoir faire et beaucoup de travail.
On peut se poser la question "Les sites officiels de musiciens sont-ils encore utiles ?" au vu de leur fréquent abandon ou mauvais état.

Mais c'est aussi la nature même de la relation entre l'artiste et ses fans qui a changé avec la multiplication de ces nouveaux modes de communication.

Dans "Stratégies des artistes-musiciens sur les réseaux sociaux numériques", AMÉLIE BICHON-FORTIN, EMMA POUPEL, WAN WU, et TUONG LINH LE dans le cadre du cours de Théories des médias sociaux (Browse), L'industrie de la musique et l'arrivée du numérique écrivent:
Jahneration Musiques d'ici et d'ailleurs

"Désormais, de nouveaux acteurs de l’Internet s’implantent et bouleversent cette industrie de la musique et en occupant des rôles incontournables. On pourrait typographier ces nouveaux acteurs en quatre groupes :+
• Les netlabels ou "labels communautaires" comme My Major Company qui sont des alternatives aux maisons de disque+
• Les plateformes de streaming comme Spotify, Deezer+
• Les entreprises comme Apple et Amazon, alternative pour la distribution+
• Les réseaux sociaux comme Facebook, Twitter et Youtube comme alternatives aux médias traditionnels (Ledoux, 2013).

... l’artiste se trouve face à une situation complexe : la multiplication des canaux avec des réseaux sociaux numériques spécialisés d’une part et les réseaux sociaux généralistes d’autre part.
Étant donné que les informations sur ces réseaux se relaient, l'enjeu est de construire une identité numérique cohérente et distinctive.
Ensuite, dans cette ère où le consommateur est devenu le consom’acteur, une relation active et multidirectionnelle avec les fans est exigée.

Enfin, pour répondre au discours utopique sur la démocratisation de la culture, qui prône une visibilité sur le web des artistes écartés des circuits de promotion traditionnels, les constatations empiriques suggèrent une réalité bien plus nuancée."

Les changements de comportement:
Fête de la musique

Les internautes abandonnent le CD écoutent en streaming ou des copies piratées, mais payent leur ticket d'entrée au concert et y vont plus souvent.

Le streaming légal se met progressivement en place.

Les artistes recourent de plus en plus à l'auto-production (un équipement studio sur ordinateur devient abordable), à l'auto-promotion, sollicitent la générosité des internautes.

Les contenus sont de plus en plus largement diffusés.

Cercles vertueux qui font écrire à l'Obs-Rue89: "Internet, ce qui pouvait arriver de mieux à la musique" même si, nous l'avons vu dans cet article la réalité, complexe et contradictoire exige beaucoup d'efforts des artistes pour s'adapter à ces changements.

A lire aussi: "Musicoin – La blockchain qui va libérer les artistes" la vente directe par les artistes de leur musique sur une plate-forme collaborative en Open Source.