Les Données Numériques sont le pétrole de demain.Les profits colossaux des GAFAM sont convoités par de multiples participants à ce colossal marché des Données. Assez obscur, il représenterait 150 milliards d'euros par an.
Ce marché est exploité par des entreprises discrètes, mais puissantes comme Experion, filiale d'Honeywell, Datalogix, du groupe Oracle, Acxion, ancienne société experte de marketing et Cambridge Analytica qui s'est illustrée récemment avec Facebook.
Ce sous-traitant de Facebook a aspiré les données de 87 millions d’utilisateurs (voir "Protéger ses données personnelles")
Qui sont ces sociétés si discrètes dont le rôle apparaît au grand jour avec le scandale Facebook-Cambridge Analytica ?
Nous ne les connaissons pas, mais elles, elles nous connaissent très intimement.
Les Big Data ont révolutionné le commerce de l'information et du marketing
Profiler des clients existe depuis que le commerce est né.Regrouper, acheter, se procurer plus ou moins légalement des fichiers clients n'est pas nouveau non plus.
Les Big Data (voir "Qu'est-ce que le Big Data ? " et "Le Big Data une nouvelle façon de percevoir les réalités") ont créé un nouveau monde et sont devenus un nouvel Eldorado pour ces sociétés.
Du marketing au rôle de courtier de données (ou data brokers)
Le rôle de courtier existe depuis longtemps.
Son rôle est officiellement reconnu au 13e siècle, quand les artisans recourent aux services de revendeurs pour leurs produits.L'histoire du droit, celle du commerce et celle de la navigation font souvent référence aux courtiers en vin, en huiles, en blé, en chevaux, en soies, etc.
L'activité de courtier est reconnue par l'Académie française dès 1694. (Wikipédia)
Le rôle de courtier de données (ou data brokers) est aussi ancien. Il était tenu par des sociétés de marketing travaillant avec des organismes de renseignements.
La grosse différence des courtiers de Données Numériques avec les courtiers d'autres produits, de matières premières ou de services est que les courtiers de données enrichissent les données en les traitant, les croisant, les "raffinant" suivant les besoins de leurs clients.
Quel est le rôle aujourd'hui de ces sociétés de data brokers ?
Les courtiers de Données Numériques (ou data brokers) se procurent les données et les traitent pour les revendre aux annonceurs, entreprises de marketing, partis politiques.
C'est le propre des Big Data est de ne pas être d'emblée significatives.
(Voir "Le Big Data une nouvelle façon de percevoir les réalités")
Par exemple, un fichier d'historique d'achat, en lui-même, n'apporte pas énormément.
Mais ce même fichier couplé à des fichiers clients contenant leurs caractéristiques sociales et économiques permet un profilage fin des produits achetés par chaque catégorie socioprofessionnelle.
En croisant des données brutes, les data brokers, ces courtiers en Données Numériques leur donnent du sens et de la valeur en fonction des objectifs de leurs clients.
Cambridge Analytica avec Facebook a profilé les électeurs de différents pays pour le compte de responsables de campagne politique.
Qui sont ces courtiers de Données Numériques ou data brokers
Pour Acxiom, par exemple, leader mondial a des implantations partout dans sur la planète et 700 millions de données sur les consommateurs du monde entier :
"Sa clientèle aux États-Unis est selon le New York Times principalement constituée d'entreprises du domaine des services financiers, de l'assurance, du marketing et des médias".
Acxiom a été décrite comme « l'une des plus grandes entreprises dont vous n'avez jamais entendu parler. », détenant des dossiers sur plus de 160 millions d'Américains (et 6 millions de foyers français).
Son chiffre d'affaires est de 1,15 G$ USD/an et ses ventes s'élèvent à 11 milliards de dollars."(Wikipédia)
Toujours d'après Wikipédia :
"Acxiom vend des outils (logiciels, mainframe, serveurs et stockage dans le cloud) et services de gestion de l'information liée au marketing, dont par différents canaux, allant de la publicité ciblée au management de base de données (traitement intensif de big data dans des environnements informatiques sécurisés) relatives aux comportements de clients ou client potentiels.
Acxiom fournit aussi des services délocalisés de type plateformes d'appels téléphoniques et d'envoi d'e-mails".
Acxiom collecte, analyse et trie l'information concernant les clients et les entreprises pour ses clients, leur permettant de réaliser des campagnes ciblées, des listes de prospects, etc.
L'entreprise peut aussi fournir des prestations d'aide à la prospective : en plus de la collecte massive d'information et de service de datamining, Acxiom s’appuie sur l’analyse de vos données pour modéliser le comportement de vos clients (produit acheté, consommation).
Acxiom, la plus grande société d'exploration de données au monde, où de vastes fermes d'ordinateurs contiennent des informations détaillées sur presque tous les adultes en Amérique.
L'exploration de données, une pratique qui prédit un comportement probable basé sur des facteurs tels que l'âge, le revenu et les habitudes d'achat, a été la norme d'or des annonceurs commerciaux. Acxiom promet à ses clients un meilleur moyen de cibler leurs messages auprès des consommateurs individuels. FRONTLINE The Persuaders
Obscurité entretenue sur leurs activités, les courtiers de Données Numériques, les data brokers, préfèrent l'ombre à la lumière
En 2015, les courtiers de Données Numériques ont été interpellés par une commission d’enquête du Sénat américain.
Sur les neufs convoqués, sept ont refusé de témoigner sur leurs activités et n'ont pas voulu donner de détails sur leurs pratiques réelles de collecte de données.Et Cambridge Analytica, spécialisée dans les campagnes politiques ?
Le financement de Cambridge Analytica vient de la famille de Robert Mercer
Robert Mercer est un "milliardaire connu pour son soutien financier massif à des campagnes politiques conservatrices, telles que l'élection de Donald Trump en 2016, la lutte contre les politiques environnementales, son soutien au climatoscepticisme ou le référendum sur le Brexit". (Wikipédia).On voit qu'il ne s'agit pas d'une entreprise neutre ou ayant des objectifs de recherche diversifiés.
C'est plutôt une arme de guerre politique au service d'une ligne bien définie.
Les dirigeants de Cambridge Analytica
La décision de fondation de Cambridge Analytica, destinée à influencer les élections de mi-mandat de 2014, intervient donc à l'automne 2013 :- Alexander Nix (PDG de SCL Group),
- Christopher Wylie (analyste),
- Stephen Bannon
- Robert Mercer se réunissent dans l'appartement de Rebekah Mercer (fille de Robert).
A la fois soutien et prenant en otage les élus républicains qu'ils aident tous les ingrédients sont là.
Nous avons vu le profil du financier Robert Mercer et le rôle de sa fille.
Stephen Bannon dirigeant de l'Alt-right (extrême droite américaine), venu défendre le racisme au congrès du Front National en France, "milite en faveur de la défense des Blancs, aussi bien que du sexisme, de l'antisémitisme, du conspirationnisme" (Wikipedia).
Alexander Nix, PDG de Strategic Communication Laboratories dont Cambridge Analytica est la filiale.
Le dévoilement du scandale des pratiques de Cambridge Analytica par Christopher Wylie
Christopher Wylie, technicien dans l'équipe dirigeante, personnalité très atypique, devient lanceur d'alerte et dénoncera la possession des données de Facebook par Cambridge Analytica.
Le 27 mars 2018, Wylie a témoigné devant le comité britannique du numérique, de la culture, des médias et du sport (alors que son PDG Alexander Nix avait démenti officiellement.) (Wikipédia)
Les pratiques révélées d'Alexander Nix, PDG de Strategic Communication Laboratories maison mère de Cambridge Analytica, principal responsable de celle-ci
En 2013, Alexander Nix configure Cambridge Analytica en vue de cibler les électeurs dans « plus de 40 campagnes politiques aux États-Unis, Caraïbes, Amérique du Sud, Europe, Afrique et Asie ». (Wikipedia)
- Cambridge Analytica aide la campagne favorable au Brexit, selon les témoignages concordants, tels que celui d'Arron Banks de Leave.EU, celui de Christopher Wylie.
Ce travail aurait été fait à titre gratuit parce que le dirigeant pro-Brexit "Nigel [Farage] est un bon ami de la famille Mercer" d'après Alexander Nix. - En février 2018, Alexander Nix déclare devant le comité du Numérique, de la Culture, des Médias et du Sport du Parlement britannique que sa société n'avait pas reçu les données de Facebook.
Filmé en caméra cachée par la chaîne Channel 4 News, Alexander Nix raconte ses techniques pour piéger les hommes politiques
(Voir la vidéo publiée par le HuffPost :"Cambridge Analytica se vante d’utiliser des prostituées et des coups montés pour influencer les élections")
Voici les techniques décrites par Alexander Nix, lui-même, pour piéger des hommes politiques :
Comment cette audition aurait pu aller plus loin que les regrets et les excuses de Zuckerberg ?
Un article de "L'OBS" brosse un tableau plus complet: "Le clan Mercer, ces milliardaires extrémistes derrière le scandale des données Facebook".
- offrir de « belles jeunes filles ukrainiennes » pour discréditer les opposants politiques au Sri Lanka". (Wikipédia)
- "offrir un marché qui est trop beau pour être vrai","offrir de l'argent" et les enregistrer en vidéo pour les menacer de les accuser de corruption
Lors que Facebook et Zuckerberg sont seuls sur le devant de la scène, bizarrement, Cambridge Analytica reste dans l'ombre
Quand Mark Zuckerberg a témoigné devant le Congrès, les interviewers de Zuckerberg sont pour partie des ignorants du monde des données numériques et pour partie des députés ayant profité du soutien de Alexander Nix et de Cambridge Analytica.Comment cette audition aurait pu aller plus loin que les regrets et les excuses de Zuckerberg ?
Un article de "L'OBS" brosse un tableau plus complet: "Le clan Mercer, ces milliardaires extrémistes derrière le scandale des données Facebook".
Ainsi que Les Echos.fr : "Alexander Nix, l'homme qui a fait trébucher Facebook"
Seule réaction, pour l'instant à tous ces scandales : le 20 mars 2018, Alexander Nix est suspendu de Cambridge Analytica.
Ecouter la rubrique Nouveau monde du jeudi 12 avril 2018 de Jérôme Colombain sur ce sujet.
Dans sa conclusion, Jérôme Colombain souligne un des problèmes que pose cette activité qui est légale et encadrée par la loi est la traçabilité des données rendue impossible par les algorithmes et les traitements nombreux et obscurs.
Le nouveau règlement général sur la protection des données (RGPD) (voir l'article "Utilisation des données personnelles : ce qu'on accepte et ce qu'on refuse") devrait commencer à mettre un peu d'ordre et de consensus dans ce qui est un véritable Far-West où les plus forts font ce qu'ils veulent sans limites et sans rendre aucun compte à personne à l'image d' Alexander Nix et de Cambridge Analytica.
Et peut-être que de plus en plus d'Américains vont se dire que les nouvelles lois européennes RPDP vont dans le bon sens ?
Ils seraient alors capables d'aller encore plus loin pour réguler un fonctionnement acceptable partout dans le monde ?
Il faut remarquer que, comme souvent, l'espionnage des données personnelles ne gênaient pas les autorités personnelles quand la destination des données pillées est les serveurs et les entreprises américaines.
Aujourd'hui, des pays comme la Chine avec Huawei, Oppo, Lenovo (Moto), TCML (Alcatel), Tinno (Wiko 5% français), OnePlus, après les Coréens Samsung et LG prennent une part dominante du marché des smartphones, avec toutes les possibilités de recueillir leurs données d'utilisation.
Les Américains vont donc devenir sensible aux recueils des données personnelles et leurs utilisations, ce qui pourrait être à l'origine d'accords internationaux qui, seuls, pourraient être efficaces.
A condition, bien sûr, de préférer la recherche d'accords et de lois internationaux plutôt que des guerres et affrontements politico-commerciaux.
L'affaire Facebook-Cambridge Analytica n'en est qu'à ses début
Ecouter la rubrique Nouveau monde du jeudi 12 avril 2018 de Jérôme Colombain sur ce sujet.Dans sa conclusion, Jérôme Colombain souligne un des problèmes que pose cette activité qui est légale et encadrée par la loi est la traçabilité des données rendue impossible par les algorithmes et les traitements nombreux et obscurs.
Le nouveau règlement général sur la protection des données (RGPD) (voir l'article "Utilisation des données personnelles : ce qu'on accepte et ce qu'on refuse") devrait commencer à mettre un peu d'ordre et de consensus dans ce qui est un véritable Far-West où les plus forts font ce qu'ils veulent sans limites et sans rendre aucun compte à personne à l'image d' Alexander Nix et de Cambridge Analytica.
Vers des lois mondiales de préservations des données personnelles ?
Et peut-être que de plus en plus d'Américains vont se dire que les nouvelles lois européennes RPDP vont dans le bon sens ?
Ils seraient alors capables d'aller encore plus loin pour réguler un fonctionnement acceptable partout dans le monde ?
Il faut remarquer que, comme souvent, l'espionnage des données personnelles ne gênaient pas les autorités personnelles quand la destination des données pillées est les serveurs et les entreprises américaines.
Or la suprématie technologique américaine est maintenant contestée
Aujourd'hui, des pays comme la Chine avec Huawei, Oppo, Lenovo (Moto), TCML (Alcatel), Tinno (Wiko 5% français), OnePlus, après les Coréens Samsung et LG prennent une part dominante du marché des smartphones, avec toutes les possibilités de recueillir leurs données d'utilisation.
Les Américains vont donc devenir sensible aux recueils des données personnelles et leurs utilisations, ce qui pourrait être à l'origine d'accords internationaux qui, seuls, pourraient être efficaces.
A condition, bien sûr, de préférer la recherche d'accords et de lois internationaux plutôt que des guerres et affrontements politico-commerciaux.
