Comment est-ce possible ?
Internet est tenu pour responsable:
- de la polarisation extrême des opinions et des intolérances réciproques.
- du repli sur soi et chez soi de ceux qui restent collés à leur écran jour et nuit
- des points de vue fermés sur soi-même dans une bulle autoalimentée
- des addictions à la violence et au sexe
- de l'inculture, de l'écriture phonétique et des fautes d'orthographe
- et quoi d'autre encore ?
Internet bouc émissaire ou à l'origine de la violence et de la haine ?
Si en plus ce coupable peut servir, en même temps, de bouc émissaire à d'autres défoulements, c'est encore plus pratique.
Par contre, il n'est pas question de penser qu'un moyen technique quel qu’il soit, aussi performant , moderne ou puissant soit, en lui-même porteur uniquement de progrès ni d'ailleurs uniquement malfaisant.
Un moyen dépend de la façon dont il est utilisé.
(Arrêter d'accuser le marteau de vous a tapé sur les doigts !
c'est vous qui avez raté le clou.)
Polariser les opinions extrêmes ?
Des études ont été menées aux USA, où, en particulier, le fossé se creuse et les antagonismes deviennent de plus en plus violents entre les opinions, les communautés, les origines sociales, les modes de vie, les niveaux économiques et sociaux.
Ces polarisations se retrouvent dans les réseaux sociaux et sur internet.
Et en retour, elles contribuent indéniablement à amplifier les antagonismes et les intolérances.
Qui de la poule ou de l’œuf est à l'origine du cycle ?
Est-ce internet est-il victime ou coupable ?
Les deux certainement !
Internet est le reflet de ceux qui l'alimentent et à son tour participe à la radicalisation des points de vue et à la détérioration des échanges sociaux.
Les images violentes sur les écrans ont des effets néfastes reconnus
La TV est le premier écran introduit dans les foyers familiaux.
Il a été accusé de favoriser l'obésité et la diffusion d'images violentes.
Les études menées aux USA sont particulièrement inquiétantes:
("La télévision nourrit la violence" article de Reporterre, très documenté, qui décrit comment la consommation télévisuelle suscite des comportements violents).
"On constatait aussi une augmentation de 160 % des agressions physiques entre le CP et le CE1 dans une petite ville isolée du Canada dès l’introduction de la TV entre 1973 et 1975. Un tiers des sujets emprisonnés pour agression admet avoir imité des gestes observés à la télévision. Dans la 2e étude, Johnson (2) a suivi 707 familles de l’état de New York sur 15 ans et noté une corrélation entre la violence et du nombre d’heures quotidiennes passées devant la télé.
Un inventaire recensant les actes de violence vus à la télévision française dans l’année 1988 et publié dans le journal Le Point révèle des chiffres accablants : 670 meurtres, 15 viols, 848 bagarres, 419 fusillades, 11 hold-up, 8 suicides, 14 enlèvements, 32 prises d’otage, 27 scènes de torture, 18 drogués, 9 défenestrations, 13 tentatives de strangulation et 11 scènes de guerre.
Actuellement, près de 50 % des enfants (résidant en ville ou à la campagne) ont la télé comme loisir après l ‘école d’après une étude de l’UNESCO réalisée sur 23 pays"
Scène de violence |
On ne peut transposer ces conclusions directement en France. Mais les modes de vie s'américanisant, les films, actualités et dessins animés américains envahissant le monde leur influence est prévisible.
Internet est-il à l'origine de la violence et de la haine ?
Quand des images violentes ou haineuses sont diffusées sur internet, elles ne peuvent qu'avoir les mêmes effets malsains qu'à la télévision.
La grande différence entre la télévision et internet est que dans un cas la diffusion est presque entièrement passive, on ne peut qu’allumer-éteindre et zapper.
Internet est interactif. On cherche, on s'abonne à certaines diffusions, on participe à des débats, on télécharge des contenus, on en diffuse, on donne des avis...
L'effet d'internet est donc multiplié par la participation active de chacun.
(Sans compter les possibilités d'organisations criminelles qui ne sont pas l'objet de cet article).
Dessin animé violent |
Internet facteur de dépression ?
Un abus d'internet mène souvent à la dépression et
un abus d'internet est fréquemment un signe de dépression.
Quelqu'un qui s'isole va se sentir plus à l'aise dans le monde virtuel d'internet que d'affronter les contrariés de la vie réelle.
Mais sans internet, va-t-il sortir de son cocon ?
Une étude médicale a été menée sur des les adolescents, en Corée du Sud, là où les dépressions sont nombreuses et sévères dans toutes les couches de la population. (Enquête "Internet déprime les ados" de Docbuzz)
"Les résultats sont dramatiques: 34% des jeunes filles présentent des symptômes dépressifs et 23% des jeunes hommes.
Ce résultat se confirme sur les 3 années.
L’utilisation d’internet est plus élevée chez les filles que chez les garçons.
Les garçons y font plus de jeux (60% contre 20% chez les filles), vont plus sur les sites réserves aux adultes (10% contre 0%), alors que les filles sont plus impliquées dans les réseaux sociaux (40% contre 20% pour les garçons)".
Les jeux, même violents ou les sites réserves aux adultes des garçons ne correspondent pas plus aux déprimes que les réseaux sociaux fréquentés par les filles.
Les jeux violents polarisent les accusations tapageuses ainsi que les sites réservés aux adultes.
Or, on s'aperçoit que ce sont les filles qui elles fréquentent beaucoup plus les réseaux sociaux qui ont un taux de dépression plus important (34%) que les garçons (23%).
Je ne justifie ni ne défends en aucun cas les jeux violents ou les sites réserves aux adultes.
Ils ont leurs effets néfastes en même temps qu'ils servent de défouloir.
La conclusion de l'enquête de ces médecins pose une bonne question et une recommandation précieuse
"Un tiers des adolescents souffrant de symptômes dépressifs est un chiffre très élevé qui a été retrouvé également dans d’autres populations.
Les jeunes femmes semblent plus vulnérables. Internet est un facteur favorisant. [...]
Une explication est fournie par Kraut qui discerne dans les relations humaines les liens forts et les liens faibles.
Internet, par le biais de ses réseaux sociaux ne crée que des liens faibles, la véritable vie sociale crée des liens forts.
L’utilisation abusive d’internet remplace les liens forts par des liens faibles, avec les conséquences montrées par cette étude.
L’évaluation du temps passé sur internet devrait servir d’alarme aux médecins et aux parents pour détecter un risque chez les adolescents, filles et garçons."
Pour aller plus loin: "Les écrans rendent-ils violent ? de Xavier Molénat" sur violence et pornographie.