lundi 27 novembre 2017

Pas d'Intelligence Artificielle chez les robots ?

Alors que tout le monde disserte :

  • du niveau de l'Intelligence Artificielle des robots (I.A.), 
  • de la façon et du moment où les machines deviendront plus intelligentes que l'humain
  • du danger que les robots représenteront pour l'espèce humaine
  • de comment maîtriser ce danger 
  • comment faire un pacte avec les machines 

Un personnage de poids, Luc Julia, développeur de Siri, l'assistant vocal "intelligent" d'Apple, a donné des interviews sur la période que nous vivons et qu'il appelle : "la préhistoire de la révolution digitale".

Et ses réflexions ne peuvent passer inaperçues :

  • l’Intelligence Artificielle, pour lui, n'existe pas, c'est une entourloupe marketing !
  • le Monde Numérique de demain sera celui des objets connectés dialoguant entre eux

L’Intelligence Artificielle n'existe pas ?

 Luc Julia est bien placé pour donner des avis sur les assistants vocaux dits "intelligents" puisqu'il a dirigé le développement de Siri, celui d'Apple et est maintenant à la tête du département d'innovation de Samsung.

Il connait donc bien les développements et les projets les plus avancés des machines et des algorithmes les plus performants.

Son refus de reconnaître l'intelligence aux machines serait une façon de les déprécier ? un déni de leurs performances ?

Ou s'agit-il de replacer les choses à leur juste place ? de dénoncer une confusion certes plus attractive mais aussi mystificatrice. Une mauvaise façon de faire du marketing, du buzz, de faire peur, d'inquiéter. Et finalement, une façon de mystifier plutôt que d'expliquer.

Intelligence ou connaissance ?


Il fait des démonstrations très simples :
  • Un enfant a besoin des quelques images d'un chien pour comprendre et reconnaître ce qu'est un chien.
  • Une machine arrivera aussi à reconnaître un chien, mais il lui faudra des dizaines de milliers de photos de chiens pour apprendre à le faire.
Sa conclusion est que la machine apprend, certes.
La machine apprend à reconnaître et à connaitre.

Il s'agit donc, en réalité, de connaissance artificielle.

Et battre le champion du monde du jeu le plus difficile à jouer, le jeu de Go : n'est pas une preuve d'intelligence ?


Un autre exemple révélateur : le jeu de go et le jeu d'échecs.

Les puissances des ordinateurs d'aujourd'hui et leurs algorithmes sont effectivement impressionnants.

Les machines savent battre le meilleur joueur humain !
"Un joueur de go professionnel battu par un ordinateur: pourquoi c'est historique"
"Un ordinateur champion du monde d’Échecs : histoire d’un affrontement homme-machine"

La conclusion à en tirer est que :
  • quand on apprend des règles à une machine, elle les met en pratique mieux et plus vite que l'humain
  • quand, en plus, on programme la machine pour qu'en emmagasine l’expérience d'un nombre énorme de parties, la machine apprend mieux et plus vite que l'humain. C'est le "deep learning", l'apprentissage profond qui nourrit le "DeepMind", l'esprit profond de la machine.
Le Deep Learning est effectivement une construction très impressionnante d'algorithmes qui construisent des couches successives de raisonnements de plus en plus évolués.

Google a acheté en 2014 la société anglaise "DeepMind" qui était une des sociétés les plus avancées dans l'intelligence artificielle.
Alpha Go est un programme mis au point par Google spécifiquement pour jouer au jeu de go.
Le jeu de go est considéré comme des plus complexes à jouer.

En 2015, AlphaGo est le premier programme à battre un joueur professionnel.
En 2016, il bat le 9e joueur mondial.
En 2017, il bat le champion du monde et peut prendre sa retraite : mission accomplie !

Google  décrit "The story of AlphaGo so far", l'histoire d'AlphaGo avec un certain manque de retenue (et de rigueur scientifique).
L'article est enthousiasmant certes, parlant de cette "nouvelle percée [qui] a le potentiel de faciliter une percée scientifique majeure et, ce faisant, de changer radicalement le monde pour le meilleur".

"Pendant les matchs, AlphaGo a joué certaines victoires très inventives, dont plusieurs - dont le 37 dans le deuxième match - ont été si surprenantes qu'elles ont bouleversé des centaines d'années de sagesse et ont été largement examinées par des joueurs de tous niveaux.
Au cours de la victoire, AlphaGo a en quelque sorte enseigné au monde des connaissances complètement nouvelles sur le jeu peut-être le plus étudié et le plus admiré de l'histoire".

La machine en a remontré à l'homme ?
Oui.
Elle a repoussé les limites de la connaissance et de la pratique du jeu.
Oui.
Mais n'est-ce pas le propre des machines performantes de repousser les limites humaines.

Est-ce pour autant que la machine est intelligente ?

Luc Julia fait remarquer une chose très simple : effectuons n'importe quelle modification très simple sur le damier du jeu en ajoutant des cases, par exemple. Et dans ce cas, l'humain gagnera à coup sûr les parties suivantes.

Quelles conclusions ?

Que la machine est imbattable dans le cadre de règles bien définies et immuables.
Que l'humain, lui seul, sait s'adapter, inventer des solutions nouvelles dans des milieux évolutifs.


Qu'est-ce que l'intelligence ? De quoi est-elle composée ?

Définition de Wikipédia : "L'intelligence est l'ensemble des processus de pensée d'un être vivant qui lui permettent de comprendre, d'apprendre ou de s'adapter à des situations nouvelles.

La définition de l'intelligence ainsi que la question d'une faculté d'intelligence générale ont fait l'objet de nombreuses discussions philosophiques et scientifiques.

L'intelligence a été décrite comme une faculté d'adaptation (apprentissage pour s'adapter à l'environnement ou au contraire, faculté de modifier l'environnement pour l'adapter à ses propres besoins).
Dans ce sens général, les animaux, les plantes, les outils informatiques font preuve d'une intelligence".

Dans les capacités attribuées à l'intelligence :

  • la capacité de comprendre, d'analyser peut être reconnue aux machines
  • la capacité d'apprendre, d'accumuler les connaissances peut être reconnue aux machines

  • la capacité de s'adapter à des situations nouvelles, inconnues, les machines en sont incapables.
Remplacer "Intelligence Artificielle" par "Connaissance Artificielle" ?


 Luc Julia propose donc de parler de "connaissance artificielle" et non plus d'"intelligence artificielle".
Sacrément démystificateur !

Mais cette "Connaissance Artificielle" correspond bien aux formidables capacités des ordinateurs et n'est pas réductrice.
La "Connaissance Artificielle" est capable d'apprendre, de progresser et d'apporter une aide considérable aux humains.
Mais la "Connaissance Artificielle" n'est pas capable d'innover, de s'adapter au-delà des règles qu'on lui a fixées, c'est l'intelligence humaine qui devra lui apprendre de nouvelles règles pour qu'elle emmagasine de nouvelles connaissances.

Et l'avenir ? le smartphone est une interface limitée d'après Luc Julia

Nous sommes à la préhistoire de la révolution digitale dit Luc Julia.

Pour lui, le smartphone est un outil limité parce que difficile à prendre en main.
Il faut faire des gestes et des manipulations compliquées.

La communication naturelle est une communication multimodale, c'est-à-dire une communication qui emprunte plusieurs canaux différents.
Quand vous parlez avec quelqu'un, vous entendez ce qu'il dit, mais vous voyez ses yeux, les expressions de son visage, vous entendez la tonalité de sa voix, vous voyez les positions de son corps.
Et c'est l'ensemble de ces informations qui vous permettent de comprendre le message transmis.

C'est la raison pour laquelle un échange écrit ne suffit pas pour s'entendre dans des cas où on a besoin de mieux se comprendre. Et que, dans des cas encore plus difficiles, on a besoin de discuter face à face pour échanger tous les signaux nécessaires.
Objets communicants

La compréhension du contexte ne peut être saisie que par un ensemble d'objets communicants entre eux

La "compréhension" des machines sera du même ordre.

Un seul objet connecté, même un smartphone, devra être manipulé plus longtemps pour formuler une demande précise dans un contexte qu'il faut aussi préciser.
Par contre, si plusieurs objets connectés communiquent entre eux, ils peuvent mieux comprendre-apprendre le contexte et savoir ce qu'il faut faire.

Sans que l'on puisse aujourd'hui mieux définir comment ce contexte sera "compris" par les objets connectés se profile une organisation des objets connectés proche des fourmis dont l’organisation collective est la vraie force.

Moi, je suis assez convaincu.

Qu'en pensez-vous ?
pierre.rene654@gmail.com