Algorithme |
nous aident ou nous menacent ?
Résoudre les problèmes automatiquement à notre place c'est à la fois fascinant et inquiétant.
La rapidité, la performance, la quantité de données traitées augmentent chaque jour.
Les domaines d'application aussi. Ils empiètent largement sur notre vie personnelle: même anonymisés, les profils analysés ont pris un poids considérables dans le marketing et tous les domaines (Voir mon article sur les Big Data)
Peut-on exiger la transparence des algorithmes qui décident pour nous ?
Exemple: les algorithmes de Google pour décider du référencement d'un site d'e-commerce
Pour ceux qui vivent du commerce de leur site, Google peut favoriser ou pénaliser leur activité suivant que le site est rapide à trouver ou qu'il se trouve relégué à la fin des réponses.Il est vrai que pour mieux référencer leur site, certains sont prêts à tout et n'importe quoi. Ils paient des spécialistes à entrer des "mots-clés" dans leurs site ou blog. Même quand ceux-ci n'ont rien à voir avec leur contenu, ces tricheries sont présentées comme des astuces.
En retour, Google analyse plus profondément avec des algorithmes complexes, les contenus des publications pour contourner ces leurres et tricheries.
Les professionnels du référencement demandent la transparence de ces algorithmes pour mieux les leurrer de nouveau.
Peut-on, dans ce cas, prôner la transparence ? ou est-on d'accord pour que les analyses des algorithmes détectent mieux les vrais contenus des sites pour les évaluer avec plus de rigueur et de justice ?
On voit que le problème n'est pas toujours aussi simple qu'on voudrait le croire.
(Voir l'article de "Relations-Publiques Pro": "E-commerce et Google : amis ou ennemis ? Sitepenalise.fr décrypte l’algorithme Google et ses pénalités"
Algorithme reconstruction de paroi |
Les algorithmes remplacent-ils notre cerveau ?
Un article de l'Enseignement Supérieur du Québec a été distingué pour poser le problème: "Quand les algorithmes remplacent le cerveau"Il dénonce d'une part le danger de ne plus prendre nos décisions nous-mêmes.
Nos nuances, nos sensibilités propres ne sont plus reconnues ni prises en compte.
C'est vrai. Mais n'est-ce pas aussi le cas dans une organisation bureaucratique étouffante, avec ou sans algorithmes ?
Il dénonce également le consumérisme poussé à son summum dans les règles enfouies dans les algorithmes.
Il conclu :"En somme, toute invention comporte des bénéfices et des inconvénients. C’est à nous d’utiliser notre aptitude entièrement humaine à faire les bons choix!"
Oui, mais comment ?
Les algorithmes sont-ils vraiment tout-puissants ?
Dans Télérama.fr Olivier Tesquet interview le sociologue Dominique Cardon en posant la question : "Les algorithmes sont-ils vraiment tout-puissants ?"Celui-ci rappelle qu'un algorithme fonctionne comme une recette qui dépend à la fois des ingrédients, de l'ordre dans lequel on les ajoute et de leur traitement.
Il montre les limites, les approximations les partialités des algorithmes.
Pourtant les algorithmes fascinent et sont ressentis et quelques fois utilisés dans une entreprise totalitaire d'imposer des points de vue, des solutions toutes préparées.
Remarquons que c'est aussi le même usage qui est fait dans les médias pour présenter des spécialistes comme des experts qui doivent décider à notre place: le "One best way" de Taylor est devenu la pensée unique "No alternative".
Ce n'est pas très nouveau, avec ou sans algorithmes.
Dans l'algorithme, on ne met que les ingrédients que l'on a envie de mettre et on lui fait faire la démonstration qu'on a envie de lui faire faire.
Vous rappelez-vous qu'à l'époque de la généralisation des ordinateurs, ceux qui avaient fait une erreur la justifiaient le plus souvent en expliquant: "C'est la faute de l'ordinateur"!
Maintenant que les ordinateurs ont prouvé leur efficacité, on recourt au même argument, mais cette fois-ci retourné: "C'est vrai puisque l'ordinateur l'a dit !"
Mais Olivier Tesquet, dans cet article: "Les algorithmes sont-ils vraiment tout-puissants ?", montre qu'il est aussi facile (ou difficile) de contester un algorithme qu'un raisonnement humain et qu'on peut l'utiliser de la meilleure ou de la pire des façons suivant qu'on le laisse faire des choix pour nous (dans le Top 50, par exemple) ou qu'on impose ses propres recherches.
Je reprends entièrement ses dernières recommandations:
"Comment reprendre le contrôle des algorithmes ?
Nous devons mettre au point des curseurs pour pouvoir les régler, être acteurs du couple que nous formons avec eux.Il faut aussi être vigilant sur la question de la « loyauté » des calculs car on ne sait pas s'ils font ce qu'ils prétendent faire.
Ils peuvent par exemple produire de la discrimination parce qu'ils n'en connaissent pas les critères.
Il est important que chercheurs, associations et société civile développent des outils pour « auditer » les algorithmes, les mettre en débat, questionner leur fonctionnement, opposer aux calculs d'autres calculs.
Quand l'Europe essaie de faire un procès à Google — en l'accusant d'abuser de sa position dominante sur les moteurs de recherche —, elle veut le prouver avec des captures d'écran des services concernés. Elle devrait user d'autres moyens, des machines virtuelles et des statistiques.
Mais surtout, il faut encourager une formation critique aux calculs algorithmiques : cela devrait faire partie de l'éducation numérique, cette nouvelle culture du code qui doit nous accompagner dans nos usages."
En France, la CNIL organise un débat sur les algorithmes
Au-delà des croyances extrêmes que les machines ne peuvent qu'aider l'homme, ou qu'à l'inverse elles vont prendre le pouvoir, il y a des débats plus utiles:La CNIL (Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés) a fait réaliser un sondage IFOP montrant que 80% des Français considèrent que les algorithmes font partie de leur vie de tous les jours et 70% qu'ils constituent même un enjeu de société.
« Les algorithmes sont-ils transparents, loyaux ? Laissent-ils aux individus leur autonomie ? Une interrogation monte dans le grand public, qui, si elle n’est pas traitée, peut même condamner les promesses des algorithmes », explique Isabelle Falque-Pierrotin, la présidente de la CNIL.
« Les algorithmes sont la proie de tous les fantasmes. D'un côté, il y a la fascination technologique pour ces objets. D'un autre côté, il y a aussi une peur irraisonnée, où l’on se dit : “Les algorithmes vont me prendre mon job, me condamner à mort si je suis un malade en fin de vie ou me conduire en prison directement parce qu’il n’y aura plus de juges”,
Voir mes articles:
"L'algorithme-patron, l'économie à la demande organisée par les plates-formes. Où va-t-on ?"
et "Le Big Data une nouvelle façon de percevoir les réalités"
Ce débat a pour objectif de cerner les questions éthiques réelles. »
La réflexion sur ces outils est aujourd'hui mondiale. « On peut coloniser des gens avec des algorithmes. L’idée, c’est de s’en servir comme des outils.
Quel est le pacte social collectif que nous voulons ? », s’interroge la présidente de la CNIL..
et nous aussi !
Lire: "Qu'est-ce que la sousveillance ?": les nouvelles formes d'action.